Les 100 ans bien sonnés de la cloche de l’église St. George

Le clocher de l’église St. George abrite une seule cloche qui rythme la vie de la communauté anglicane.  Elle convoque les fidèles à la messe.  Elle célèbre les mariages, les baptêmes, les visites épiscopales et les grandes fêtes religieuses.  Le son du glas signale la mort d’un de ses membres et accompagne le cortège funèbre jusqu’au cimetière.  Jadis, elle a servi d’alarme pour signaler les grands feux.  À contrario, elle s’est associée à des moments d’allégresse collective tels que la célébration de la fin des deux guerres mondiales.

Cette cloche patrimoniale est aussi un objet d’art puisqu’elle est le fruit d’un travail spécialisé et soigné : elle doit être parfaite dans sa matière, dans sa forme et ses proportions, desquelles dépend un son juste et riche.  Enfin, elle est une pièce unique, puisque le mode de fabrication implique chaque fois la destruction du moule.

Par qui diable cet objet si beau et parfait a-t-il été créé ?

La cloche de l’église St. George, à l’instar de toutes les cloches d’importance, est «tatouée» de diverses inscriptions qui déclinent son identité.  Pour l’examiner de près, il faut cependant grimper les 15 mètres qui la séparent du sol par diverses échelles fixées à l’intérieur de la tour.  Au terme de son ascension, l’observateur découvrira son flanc paraphé de la marque du fondeur MEARS & STAINBANK, de la date de fabrication 1912, du nom du propriétaire ST. GEORGE’S CHURCH DRUMMONDVILLE, P.Q. ainsi que d’une paraphrase :  GIVE EAR UNTO MY CALL : « ALL YE WHO FAITHFULLY ENTER IN SHALL IN NO WISE BE CAST OUT » (Prêtez l’oreille à mon appel : « Tous ceux qui entreront ici avec foi ne seront pas rejetés »). 

La fonderie britannique Mears & Stainbank a coulé les cloches les plus célèbres d’occident dont la première cloche de la liberté américaine (1752) et celle hissée dans la tour du Big Ben de Londres pesant 13 000 kg qui sonne les heures depuis 1858. Plus près de nous, signalons la cloche de la basilique Notre-Dame de Montréal, la plus grosse cloche expédiée par bateau par la prestigieuse fonderie.

À l’automne 1912, après un voyage par mer et par chemin de fer de près de 8 000 km, la grosse cloche de l’église St. George arrive à la gare de l’Intercolonial Rw, rue Lindsay.  Elle franchit les quelques mètres qui la séparent de sa destination finale, soit l’enceinte de l’église, sur un chariot tiré par des chevaux.   On ne sait rien sur le procédé utilisé pour hisser la cloche au sommet de la tour, une opération laborieuse en l’absence de grue et délicate étant donné l’exiguïté du portique à l’intérieur duquel on devait la hisser.  Mais on s’imagine les paroissiens en liesse en entendant la première volée qui dévoilait enfin la richesse de son timbre.

Tout au long de ses 200 ans d’histoire, la paroisse St. George ne réunit jamais plus que 500 fidèles.  L’acquisition d’une cloche aussi imposante et onéreuse témoigne de leur fierté et de leur foi en leur Église.

Yolande Allard

 

VISUEL IC-2.3e195.jpg : Des gens de la communauté, devant l’église St. George, au début du XIXe siècle. (SHD, Collection régionale; IC-2.3E195)