La naissance d’une colonie militaire, création de Drummondville

La guerre qui oppose de 1812 à 1814 les États-Unis et la Grande-Bretagne oblige celle-ci à dépêcher des troupes pour défendre le Haut-Canada (Ontario) et le Bas-Canada (Québec) contre la menace d’invasion.  Les autorités lèvent également des régiments de milice, comme la compagnie des Voltigeurs canadiens, commandée par le lieutenant-colonel de Salaberry et par le major intérimaire Frederick George Heriot, militaire de carrière arrivé à Québec en 1802.  Les Voltigeurs se signalent à la bataille de Châteauguay et de Crysler’s Farm (Haut-Canada) en 1813. Le Traité de Gand du 24 décembre 1814 ayant rétabli la paix, les autorités décrètent le licenciement des Voltigeurs canadiens en mars 1815.

L’Angleterre traverse une grave crise financière et a déjà bien assez de militaires démobilisés sur les bras; elle les incite donc à s’installer au Bas-Canada. Le gouverneur Prevost suggère de peupler la région des Cantons de l’est de soldats licenciés car ils constitueraient une défense efficace contre la menace des États-Unis « sur ces parties de frontières… les plus exposées aux attaques ».  En formant un établissement militaire agricole dans la région, le gouvernement se donne les moyens de défendre à peu de frais l’un des accès à la vallée du Saint-Laurent. 

Le gouvernement promet aux soldats démobilisés cent acres de terre, 200 aux officiers, des provisions pour un an, les outils et les instruments agricoles nécessaires.  Malgré tout, Prevost doute qu’un soldat devienne un bon cultivateur dans « un pays sauvage offrant des difficultés innombrables » et obligeant à « un travail pénible et incessant ». Il nomme Heriot, devenu lieutenant-colonel, surintendant général de la colonisation du Bas-Canada; ce mandat est confirmé par Gordon Drummond, gouverneur par intérim en 1815-1816.

En mai 1815, Heriot vient en reconnaissance sur la rivière Saint-François pour déterminer le lieu où établir la colonie; il est de retour le 29 juin, date qui marque la naissance de Drummondville.

En 1815, arrivent à Drummondville des miliciens démobilisés, d’anciens combattants de l’armée régulière, suivis en 1816 par les soldats licenciés des régiments suisses de Meuron et de Watteville.

Quelques dizaines de familles s’installent tant bien que mal dans la région; on construit des baraquements pour loger temporairement les derniers arrivés.  Mais les premiers départs ne tardent pas; le catastrophique été 1816 (il neige en juin et en août) en décourage plus d’un; les maigres récoltes, les rations insuffisantes annoncent la famine, ce qui en pousse plusieurs à partir.  Il ne reste bientôt que peu de traces de la colonie militaire; en1831, on ne compte que deux vétérans des Voltigeurs et sept de Meuron dans le canton de Grantham; le peuplement véritable sera le fait de colons venus des seigneuries voisines. Heriot reprend du service en 1837 dans le contexte de la Rébellion : il reçoit le commandement militaire des Cantons de l’est et recrute pour les Volontaires loyaux des Cantons de l’est afin réprimer tout soulèvement.  Il y a quelques alertes, mais pas d’incident grave.  Peut-être pour services rendus, Heriot est promu major général en 1841, deux ans avant sa mort.