Walter-Alexandre Moisan, un long règne à la mairie (1924-1936)

 

Né le 17 mars 1880 à Drummondville, Walter-Alexandre Moisan est le fils du marchand John Moisan, originaire de Saint-Grégoire-d’Iberville et d’Elizabeth Watkins, de Saint-Germain-de-Grantham. Promis à un brillant avenir, le jeune Moisan complète son cours d’études classiques au Séminaire de Nicolet, avant de s’intéresser à la philosophie au Collège Saint-Dunstan, situé sur l’Île-du-Prince-Édouard. Il entame ensuite des études en droit à l’Université Laval de Montréal, devenant notaire à la fin de son cursus, en juillet 1904. Au mois de septembre de la même année, il débute sa carrière dans sa ville natale où il ouvre son cabinet. Deux ans plus tard, il épouse Béatrice Raîche, fille du notaire Joseph Raîche, de Roxton Falls, avec qui il aura cinq enfants.

Engagé dans sa communauté, Moisan agit à titre de secrétaire-trésorier de la Ville de Drummondville dès le 11 mars 1905, puis troc la trésorerie pour le greffe de la municipalité en 1914. Fort impliqué dans l’appareillage municipal, Moisan est le candidat tout désigné pour remplacer Napoléon Garceau lorsque celui-ci quitte la mairie au début de l’année 1924. Moisan est alors élu par acclamation et profite dès lors d’une ville en plein développement. L’administration Moisan poursuit sur la lancée et multiplie les bons coups en attirant nombre de manufactures faisant la fierté de la localité au cours des décennies suivantes, dont la Canadian Marconi en 1925, la Canadian Celanese en 1926, la Dennison Manufacturing en 1930 et la Eagle Pencil en 1931.

Après avoir été élu sans contestation en 1926 et en 1928, l’incertitude plane, à l’aube des élections du 1er février 1930, quant au retour du premier magistrat au conseil de ville. Plusieurs centaines de citoyens signent alors une requête au courant du mois de décembre 1929, demandant à Moisan de se présenter à nouveau à la mairie. Après quelques jours de réflexion, ce dernier annonce qu’il accepte de briguer les suffrages et de mettre ses « humbles talents » au service de la population. Alors que tous les candidats à l’échevinage sont élus par acclamation, le maire sortant fait face à son prédécesseur, Napoléon Garceau. Cette journée de vote attire une participation citoyenne record de 90 %. Moisan l’emporte, notamment grâce au vote ouvrier, par une faible avance de 86 bulletins.

Déjà sensible à la cause des travailleurs, le krach boursier d’octobre 1929 ne fait que stimuler davantage l’engagement du maire Moisan. Protégées par des barrières tarifaires, les manufactures de textile, majoritaires à Drummondville, sont sensiblement épargnées, limitant le taux de chômage de la ville à 9,9% en 1931, contre près de 25% en 1932 pour le Québec. Même si Drummondville est dans une position enviable, cela n’empêche pas l’administration Moisan de mettre en branle d’importants travaux publics au début des années 1930, afin de fournir une source de revenus aux chômeurs.

Le 6 novembre 1933, lors d’une assemblée spéciale des manufacturiers de Drummondville, le premier échevin sollicite la participation de toutes les industries afin d’aider la municipalité à secourir les familles nécessiteuses. La Ville prépare alors une liste de ces ménages, en plus d’émettre des certificats de citoyenneté aux Drummondvillois, et demande aux chefs d’entreprise de prioriser la main-d’œuvre locale s’ils doivent recruter de nouveaux effectifs.

Alors que tout le monde avait l’impression que l’entièreté du conseil municipal serait réélue sans contestation en vue des élections du 1er février 1934, le conseiller Joseph-Henri Tétreau dépose son bulletin de candidature, tout juste avant la limite, afin de faire la lutte à Moisan. Le maire sortant n’étant pas encore parfaitement rétabli d’une grave pneumonie, qui l’a retenu à l’Hôpital général de Montréal pendant plusieurs semaines, ce dernier refuse de faire campagne et s’en remet à la décision de l’électorat. Son bilan enviable le porte à nouveau au pouvoir, par une large majorité de 424 voix sur Tétreau.

Le 13 janvier 1936, le conseil municipal tient une grande assemblée publique à la Salle Royale afin de faire le bilan de son dernier mandat. Après 31 années de service, Walter-Alexandre Moisan annonce qu’il quittera les affaires municipales, au terme de son mandat, pour des raisons de santé. Le maire en profite toutefois pour faire le survol de ses 12 ans à la tête de la municipalité. Nul doute que cette rétrospective est spectaculaire puisque tous les indicateurs soulevés ont plus que doublé : population, biens fonciers, actifs financiers, revenus, etc. Profitant de sa retraite, le notaire Moisan décède subitement à Rochester, dans l’état de New York, le 31 mai 1945, alors qu’il y était en visite depuis quelques jours.

Gabriel Cormier

Visuel : Walter-Alexandre Moisan, 1920.

Source : SHD, Collection régionale; IC-8.1a95.