La soie artificielle de la Canadian Celanese (1926-2000)

 

Au début du vingtième siècle, presque tout ce que portent les gens provient de fibres naturelles, comme le coton et le lin, de la fourrure et de la peau des animaux ou encore des vers à soie. Un changement drastique s’opère lorsque deux jeunes chimistes suisses, Henri et Camille Dreyfuss, inventent une substance synthétique appelée acétate de cellulose qu’ils commercialisent sous le nom de Celanese.

Utilisée pour la fabrication de fibres artificielles comparables à celles de la soie, cette substance crée une véritable révolution dans l’industrie du textile. Les frères Dreyfuss fondent d’abord, en 1916, la British Cellulose and Chemical Manufacturing Company à Spondon, en Angleterre, puis implantent, en 1918, la American Cellulose and Chemical Manufacturing Company à Cumberland, aux États-Unis, et la Canadian Celanese Limited Company en 1926, à Drummondville, au Canada.

L’inauguration de l’usine drummondvilloise a lieu le 13 septembre 1927. À sa pleine maturité, le complexe industriel comprend notamment une centrale thermique, des bâtiments affectés à la production, soit l’extrusion, le malaxage et l’encollage, le tissage, l’ourdissage et la teinture, une infirmerie, des ateliers d’usinage, de ferblanterie et de soudure, des entrepôts, une station de pompage et une usine de filtration de l’eau, des laboratoires, une cafétéria et un magasin de tissus. Quelques mois seulement après l’inauguration de l’usine, la Celanese se lance dans la production tisserande, afin de démontrer la qualité des produits confectionnés à partir de sa soie artificielle. Dès lors, la production de tissus débute grâce à la mise en marche d’une cinquantaine de métiers à tisser. Les métiers étant presque entièrement manuels, les tisserands doivent les arrêter régulièrement pour remplacer à la main les canettes de fil vide, un processus long et coûteux.

Des améliorations se produisent durant la décennie 1940. La compagnie installe alors des métiers complètement automatisés. Désormais, le remplacement d’une canette de fil se fait sans l’arrêt des machines et, par conséquent, la production s’en voit grandement bonifiée. Parallèlement, les chimistes du laboratoire de recherche de la compagnie développent le triacétate de cellulose à la fin des années 1940. Grâce à ce nouveau procédé, la Celanese est en mesure de s’approprier une toute nouvelle part de marché et, outre le fil d’acétate de cellulose, elle offre désormais une grande variété de fibres et de produits finis : tissu mode, tissu à doublure pour les habits, imperméables, lingerie, cordes, rideaux, tissu d’ameublement, tapis et tricot. En 1964, l’entreprise fait l’acquisition de 80 nouveaux métiers, plus rapides et équipés d’unifil, qui permettent la production d’un tissu plus uniforme. On va encore plus loin, en 1970 et 1980, lorsque l’on modernise l’usine en y installant les métiers à tisser les plus avancés, soit les métiers à jet d’eau et ceux à jet d’air.

Le 31 mars 2000, après plus de soixante-dix ans d’activité en sol canadien, Celanese ferme son usine de Drummondville. L’entreprise Textiles Monterey 1996 inc. s’en porte alors acquéreur et occupe depuis une partie des bâtiments du complexe industriel pour la production de ses tissus spécialisés.

Visuel : Vue intérieure de la Canadian Celanese, Drummondville, 1960.

Source : Société d’histoire de Drummond, Fonds Canadian Celanese ; P90-4.2-92